Les élèves de l'école ont participé pleinement à la cérémonie de cette première année du centenaire en plantant un drapeau devant les sépultures des anciens combattants.
De retour au monument aux Morts, ils ont lu deux textes inédits extraits du carnet de guerre d'un soldat, puis déposé des fleurs bleues, blanches rouges aux côtés des drapeaux bleu blanc rouge.
Dormir !!
Quelquefois, malgré tout, nous essayons de nous coucher dans le réduit attenant. Cela consistait à s’étendre tout habillé sur du grillage tendu sur un cadre de bois. Mais dormir était difficile. Ces difficultés s’avéraient parfois insurmontables.
D’abord les rats.
Les rats traitaient le lieu en pays conquis, s’y poursuivaient avec des « cui cui cui » invraisemblables, nous courant sur la figure, mangeant les lacets de cuir de nos godillots.
Ah, il faut les avoir entendus fourgonner et crier les rats pour savoir ce que c’est qu’une invasion.
Les rats, les poux. Mais les poux n’étaient rien à côté des rats. On vit avec les poux, on s’y habitue… on ne prend même plus la peine de les chercher, persuadés de l’inutilité d’une telle offensive. Vous en tuez cinquante, il en revient cent.
J’ai possédé plus tard, au Kemmel en 1918, une paillasse composée en parties égales de sciure, de paille et de poux. Une paillasse vivante. J’avais l’impression qu’elle bougeait. J’y dormis fort bien.
Avec des rats, impossible.
Nous nous mettons quelquefois en colère contre eux et décidons d’une opération. Dans le réduit où nous couchons, nous disposons à terre des reliefs de repas. Nous nous mettons en cercle autour de cet appât, chacun une pelle à la main et nous faisons l’obscurité. Au bout d’un moment les trottinements se multiplient et nous avons l’impression d’un grouillement au centre de notre cercle. Un jet de lampe électrique et toutes les pelles s’abattent en même temps. Il reste quelques cadavres… mais c’est une goutte d’eau dans la marée des rats qui nous assaillent.
Noël 1917
Réveillon.
On doit embarquer le lendemain.
Parmi les préparatifs de départ nous fêtons tout de même cette date mémorable.
L’un de nous, Loupiac, un sous-officier récemment nommé a reçu de sa femme une superbe dinde rôtie. Elle tombe à merveille pour corser un menu un peu rudimentaire.
Le lendemain dans l’après-midi nous embarquons à Chevillon… Wagons à bestiaux… c’est bien bon pour nous. Il fait un froid terrible. Nous passons par Toul. Nous arrivons au début de la nuit à Tantonville. Dans la nuit nous partons à pied pour gagner Laneuveville devant Bayon. Marche harassante et des plus difficile. La route est couverte de verglas. Deux pas en avant, un en arrière. Nous avons peut-être 25 km à parcourir dans ces conditions. Nous arrivons, morts de fatigue et de froid… et nous devons nous étendre dans des granges glaciales, sans paille, ni foin et sans couvertures.
Sources :
Journal de guerre de Bernard Mazé : les textes : "Dormir" et "Réveillon 1917"
Exposition "1914-1918" à l'église de Cerizy : photos des rats