Le 28 août, il est arrivé une colonne de munitions qui avait des chariots et des domestiques belges et du nord de la France qu'ils avaient requis pour les conduire.
Cette colonne a tout pillé à la ferme de M. Hoquet-Duquenne. Ils ont tué la majeure partie de la volaille, pris le vin et les liqueurs ainsi que 3 chevaux. Ils ont tout bouleversé dans la maison et tout éparpillé les papiers du bureau.
Et comme M. Duquenne, le beau-père, faisait observer au commandant de cette colonne que ça n'était pas bien de faire ces choses, cet officier lui a répondu que, puisqu'il faisait ces réflexions, il allait l'emmener prisonnier et que, pour commencer, il allait faire 40 kilomètres avant de la colonne.
Cette colonne est partie vers midi dans la direction de Morcourt et Saint-Quentin.
Manuscrit anonyme conservé à la Société académique
de Saint-Quentin
Le 27 août 1914, des cavaliers allemands sont arrivés à Essigny-le-Petit, le matin, par la route venant de Fontaine-Uterte.
Photo d'illustration
Ils ont traversé le village et sont allés sur la route d'Homblières jusqu'au lieu-dit "Le Moulin". Ils ont ensuite redescendu à Essigny.
L'après-midi, il est arrivé de l'infanterie. Ces soldats ont demandé au nommé Delange Gustave si il y avait des soldats français ou anglais à Essigny et, comme il disait qu'il n'en avait pas vu, ils ont fait marcher Delange au milieu de la route et eux l'ont escorté de chaque côté de la route, baïonnette au canon pour traverser le village.
Ils se sont ensuite déployés en tirailleurs entre Essigny et Homblières et les fermes du Tilloy. Et vers le soir, il est passé des troupes, et toute la nuit...
Manuscrit anonyme conservé à la Société académique de Saint-Quentin
Tout à coup, vers 9 heures ½, comme nous étions rassemblés à la maison, en attendant le prêtre, nous entendîmes des avions dont le vrombissement se rapprochait de plus en plus et qui furent bientôt au-dessus de nous ; de suite les batteries contre avions d'ouvrir le feu, cependant que les bombes commençaient à dégringoler. Abandonnant le cercueil, nous nous mîmes derrière la maison, dans le jardin (abri moral), ayant bien en vue tout ce tableau infernal, sans pouvoir changer rien à notre situation. Un bombe ayant tombé dans la cour de la gare, c'est une pluie de cailloux qui s'abattit sur la maison qui hocha d'une façon terrible. Il y eut un soldat et deux chevaux tués ; les petits civils qui étaient à côté furent épargnés. Puis ce furent des bombes sur les dépôts de matériel qui sautaient à perte de vue, et toutes ces chutes, seulement de 50 à 200 mètres de nous.
Ah ! mes amis, quels instants ! Étions-nous bien au front ? Et nous ne saurions dire lequel de nous était le plus brave !... Après au moins un quart d'heure de ce tintamarre (ce qui nous parut long), le calme revint ; nous attendions l'abbé Véron, lequel, à ce qu'il paraît, s'était couché dans le cimetière, entre deux caveaux. Enfin, il arriva à la maison ; mais il ne put que donner la bénédiction : impossible de prononcer une parole. Nous nous mettons donc en marche vers le cimetière. (Le cimetière se situait alors à l'emplacement de l'église actuelle).
Le cimetière pendant la 1ère guerre mondiale
En descendant la rue de la Gare, deux officiers qui devisaient, près des Quatre Chemins, nous regardèrent passer en rigolant, et pourtant, derrière nous, deux soldats rapportaient, étalé sur deux fusils et caché avec une capote, leur camarade tué en gare.
Comme piétons et conducteurs se sauvaient pendant l'attaque, il nous fut donner également de voir un équipage léger traîné par deux chevaux qui s'emballèrent au milieu ces explosions ; le soldat qui montait l'un d'eux fit une chute, mais ne vida les étriers que d'un pied, ce qui fit qu'il resta suspendu, sa tête traînant sur le pavé ; à chaque bond, un morceau restait sur la route, et, chevaux, voiture et homme sans tête, vinrent échouer, on ne sait comment, dans une cour de l'habitation de M. Bobeuf, l'adjoint actuel.(La parution de cet article de presse date donc de la période 1929-1940)
La tombe de la famille Lesage-Dubois
Vous pouviez rire, MM. les Allemands !
Quand, après cette alerte et la cérémonie terminée, nous regagnâmes Fonsomme, tous assez peinés, une partie des habitants nous attendait à l'entrée du village, car ils croyaient bien ne pas nous revoir tous.
C'est égal, pauvre M. Lesage ! Un homme aussi bon, serviable et considéré de tous. Votre fin tragique reste gravée dans notre mémoire, et nous répétons : Que maudite doit la guerre !...
M. Verzinet apporte la précision suivante : M. et Mme Égret ont soigné Mme Lesage jusqu'à sa mort ; elle leur a fait don de sa propriété, habitée actuellement par M. et Mme Michel Guilmain.
L'ancienne maison LESAGE
Le malheureux était étendu à terre sans vie. Près de lui, un soldat allemand, qui expliqua, ou voulut expliquer, sans rien expliquer. (Le garde champêtre étant allé voir après lui l'a trouvé sur son lit agonisant et les Allemands dans la maison, selon le second témoignage).
Toujours est-il que l'on ne trouva pas l'argent et que, vu les circonstances, l'affaire fut classée, et pour cause. Pendant ce temps, toute la population était partie, sans se douter de ce brusque décès. Les Allemands firent descendre les bagages et décidèrent que l'inhumation aurait lieu le surlendemain, au cimetière du village.
Les avions alliés avaient suivi le départ des habitants et avaient pu voir que tout le monde partait. Aussi dès le lendemain du décès, croyant bien en l'absence de tout civil, quelques obus à longue portée que tirèrent les nôtres vinrent jeter la frayeur chez l'ennemi. Un de ces obus, dépassant le village, est venu à tomber à un kilomètre de Fonsomme, dans le chemin du Roy. Il faut dire que la commune était repérée, car, en plus de la gare où l'on déchargeait les cailloux, il y avait aussi, depuis la sortie d'Essigny jusqu'au passage à niveau de Remaucourt, tout un matériel de chemin de fer et autres, et des obus de tous calibres tout le long de la rivère Somme.
Une portion de rail (à voie étroite sans doute) trouvé lors de travaux d'enfouissement.
Document Roland
Roger.
N'ayant plus de civils pour transporter le corps de la maison au cimetière, les Allemands donnèrent l'ordre à M. Henri Ponthieu, qu'ils avaient nommé bourgmestre d'office à Fonsomme de prendre juste le nombre de personnes pour se rendre à l'enterrement à Essigny. A l'heure dite, M. Ponthieu et quatre habitants de Fonsomme (dont votre serviteur), auxquels se joignirent en passant au hameau de Courcelles (Petit-Fonsomme), un homme et deux dames, se rendirent donc dans la maison mortuaire. En traversant le pays, nous étions la risée des soldats, qui étaient devant chaque maison, avec un balai, et déguisés avec des vêtements féminins. Le curé de notre pays, M. l'abbé Véron, avait obtenu l'autorisation de faire une courte cérémonie.
Croquis de Paul Seret dans "Sous la botte" de Elie Fleury
Histoire de la ville de Saint-Quentin sous l'occupation allemande.
A suivre...
Hier, lors de la visite touristique et historique de la commune, avait été évoquée l'évacuation de la commune ordonnée par les Allemands le 5 avril 1917. En voici le récit fait par un des témoins.
La clôture du registre de l'état-civil lors de l'évacuation.
Au fur et à mesure que les Allemands faisaient évacuer les villages, c'était signe qu'ils ne se sentaient plus en sécurité et qu'ils craignaient une avance des Alliés dans notre contrée, en ces jours d'avril 1917. C'est ainsi, qu'à cette époque, ils décidèrent de faire partir toute la population de notre commune en une seule fois.
Depuis quelques jours, les aviations française et anglaise exécutaient de multiples reconnaissances dans la périphérie et, rapidement, l'odre fut donné aux habitants d'avoir à se préparer pour le départ, mettant à leur disposition des voitures devant contenir seulement quelques bagages.
Ils n'allèrent que jusqu'à Etaves-et-Bocquiaux, à environ 9 à 10 kilomètres.
En ce début d'avril, il restait 237 personnes (hormis les Allemands) dans la commune.
Le 4 avril, 162 furent évacuées sur Seboncourt.
Le 5 avril, 72 sur Etaves et 3 sur Fieulaine.
Seulement, si toutes les évacuations se ressemblaient à peu près, celle de notre commune fut attristée par un fait que nous devons rappeler avec beaucoup de peine : les habitants montés en voiture, et dont le cortège s'égrenait un à un, n'en ont même pas eu connaissance ce jour-là. En effet, au moment du départ, un grand malheur advenait, un grand deuil frappait la commune par la mort soudaine de son maire, M. Lesage, ancien instituteur, demeurant non loin de la gare.
L'acte de décès de M. Lesage sur le registre d'état-civil
La voiture qui enlevait les colis de ce dernier se trouvait être la dernière de ce convoi et M. et Mme Lesage étaient montés tous deux, quand soudainement, tellement étreint par l'émotion, M. Lesage s'aperçut qu'il avait laissé son pardessus dans le couloir, et qu'une certaine somme d'argent se trouvait dans la poche intérieure. D'un bond, il fut à terre et Madame Lesage l'attendit.
Ce fut, pendant ce temps, le plus tragique de l'affaire. Ne voyant pas revenir son mari, elle s'impatienta et descendit voir ce qu'il faisait. Jugez de sa stupeur...
Selon une autre source :
M. Lesage, maire, se rappelant qu'il avait oublié chez lui les oeufs que l'officier allemand lui avait réclamés est parti pour aller les chercher mais il n'est plus revenu. Que s'est-il passé ? Mystère. Le garde champêtre étant allé voir après lui...
Ou bien encore, selon M. Verzinet, ancien maire
C'est en évacuant que M. Lesage est décédé et
dévalisé sur la route.
A suivre...
Non pas que le blog se pique de vouloir améliorer votre anglais mais en suivant le canard du moteur de recherche "Duckduckgo", j'ai trouvé :
At the commune of Essigny-le-Petit is an Etablissement H. Jacomet edition by the sculptor Etienne Camus. In bronzed cast iron it is called Poilu baïonnette au canon" and is a well-known piece in France as is Jacomet's Poilu au repos another work by Camus. Essigny-le-Petit can be reached by the D67 which runs north east from Saint-Quentin. Works marketed by Jacomet were mentioned in the articles on both the Somme and Oise regions.
Vous avez compris qu'il s'agissait du monument aux Morts de la commune.
En français, cette fois-ci, vous pouvez retrouver le monument aux Morts essignyacois en suivant ce lien.
Le monument est également présenté ici.
Autre trouvaille grâce au moteur de recherche DuckDuckGo, un athlète à Croix-Fonsomme.
Un athlète médaillé à Londres et à Stockholm lors des Jeux olympiques de 1908 et 1912 :
.
Mais qui donc ?
Il s'agit de Hanns Braun, pilote allemand d'avion lors de la première Guerre mondiale. Il est mort dans la collision de son avion avec un autre avion de sa propre escadrille de chasse. C'était le 9 octobre 1918 dans le ciel de Croix-Fonsomme.
Si vous voulez en savoir plus sur la carrière sportive de ce pilote allemand, cliquez ici.
Rechercher sur Google, c'est une chose.
Utiliser d'autres moteurs de recherche, ça paye.
Au figuré, bien sûr. Car c'est gratuit notamment chez DuckDuckGo.
Et c'est là que j'ai trouvé cette photo allemande
Et alors ?
Le dos de la photo, écrit au crayon (traduit de l'allemand en anglais puis en français).
Pilote anglais capturé à Essigny-le-Petit. Juin 1916
S'agit-il d'un des bâtiments de l'aérodrome allemand situé sur le terroir de la commune ?
Demain, une autre découverte grâce à DuckDuckGo.
Il y a un an, essignylepetit -le blog- vous décrivait le parcours du combattant Léon DELIENCOURT lors de la "der des der".
Florent GRAS est de la même classe (1902) que Léon DELIENCOURT. Il est donc né en 1882 mais il est de quelques mois plus jeune.
Extrait de son acte de naissance
C'est donc le fils de Eugène GRAS, briquetier, et de Eulalie CARPENTIER.
Le 10 novembre 1906, il épousera à Remaucourt Marie Catherine PRUVOT.
De cette union est né, à Homblières, le 9 janvier 1911, Maurice Florent Charles.
Maurice épouse, à Essigny le 12 juin 1937, Paulette Henriette GOGUILLON.
De ce mariage sont nés 3 enfants. Essignyacois de naissance, ils sont toujours Essignyacois puisqu'il s'agit de Huguette Quéry, l'aînée et de ses deux jeunes frères Florent et Jean-Paul.
La vie de cette famille se partage entre Homblières et Essigny et il n'est donc pas étonnant de retrouver le nom de Florent GRAS sur les monuments aux Morts de ces deux communes.
Sur le monument d'Homblières
Florent GRAS est soldat au 87ème Régiment d'Infanterie, le régiment saint-quentinois.
La caserne de ce régiment à Saint-Quentin
La caserne a été construite entre 1875 et 1876,
au lieudit "La Folie", emplacement de l'école de plein air et du stade municipal.
Le parcours du 87ème dans le conflit.
Les Eparges
On n'est pas très loin de Verdun. Si vous voulez en savoir plus sur les combats qui s'y sont déroulés de février à avril 1915, cliquez ici.
Le dernier jour du soldat Florent GRAS
Florent GRAS repose à la nécropole nationale "le Trottoir" aux Eparges
La nécropole
Le champ de bataille, 90 ans après.
Sources
Archives des communes d'Essigny-le-Petit et Homblières
Site Mémoire des Hommes
Site de J.C. Gallochat sur l'histoire de la ville de Saint-Quentin
Le site de vente aux enchères Delcampe
Le site chtimiste